En enquêtant sur de simples vols de voitures, les gendarmes ont mis au jour une tentaculaire escroquerie impliquant des garagistes
et des experts automobiles peu scrupuleux qui remettaient sur nos routes des véhicules potentiellement dangereux.
Des experts automobiles malhonnêtes, des garagistes peu scrupuleux et plus de 5 000 véhicules d'occasion potentiellement dangereux remis en circulation à l'insu de leurs nouveaux propriétaires. Voilà l'inquiétante conclusion d'une enquête menée ces sept derniers mois en Ile-de-France par les gendarmes de la section de recherche de Paris, qui viennent d'identifier une escroquerie d'un nouveau genre touchant les véhicules gravement endommagés (VGE).
Entamée l'hiver dernier dans le cadre du plan de lutte contre les vols de voitures souhaité par la Place Beauvau, l'enquête menée par les militaires parisiens, de concert avec des spécialistes du ministère des Transports, a permis de mettre au jour les agissements d'une petite entreprise prospère et peu scrupuleuse. En effet, selon les investigations, trois experts automobiles franciliens ont délivré sur plusieurs mois des certificats de remise en circulation pour des milliers de véhicules, sans s'assurer que ces derniers avaient été réparés comme le prévoit la législation. « A minima, on peut parler de certificat de complaisance », acquiesce un magistrat. « Mais il faut ajouter le rôle de quelques garagistes qui, par une implication à différentes étapes de la chaîne, ont contribué à l'importance de cette escroquerie qui fait craindre le pire du point de vue de la sécurité routière », assure-t-il.
Vérifier tous les véhicules
Et c'est peu dire : en l'espace de trois ans, l'enquête démontre (lire ci-contre) que ces trois suspects ont délivré plus de 5 000 certificats de remise en circulation. Alors qu'ils devront comparaître le mois prochain devant la justice, une épineuse question demeure : quel avenir pour ces véhicules potentiellement dangereux ? « La justice a transmis hier au soir au ministère des Transports la liste de l'ensemble des véhicules mis en cause », affirme une source proche de l'enquête. « Il va falloir rentrer en relation avec les propriétaires, et sans doute diligenter de nouvelles expertises afin de s'assurer que tous les équipements de sécurité sont présents, ce qui est loin d'être acquis. » Des expertises qui pourraient dépasser le million d'euros, précisent plusieurs spécialistes de l'automobile. « Pourquoi ne pas utiliser le montant des avoirs criminels (NDLR : plus d'1,5 M€) confisqués dans l'enquête ? » ajoute cette source avant de conclure : « Il faut agir vite, car, un jour, on risque de faire face à des morts sur la route. »