LE PLUS. Après 23 ans passés en tant que moniteur d'auto-école, Franck Perriard a des anecdotes à raconter. Avec ses anciens collègues Karine Vidonne et Didier Angheben, il a coécrit le livre "Les petites âneries du permis de conduire" (éd. François Bourin), dans lequel il compile les perles de ses élèves. Témoignage.
Édité et parrainé par Anaïs Chabalier
Moniteur d’auto-école depuis 23 ans, j’ai compilé dans un livre, coécrit avec deux anciens collègues de travail, les anecdotes les plus drôles liées à ma profession.
Cette idée, nous l’avons eue au cours d’une banale discussion. Après le travail, nous avions l’habitude de debriefer notre journée. À chaque fois, nous avions des histoires amusantes à raconter. Alors, un jour, nous avons décidé de prendre des notes et de rassembler nos souvenirs.
Finalement, nous avons réussi à réunir plus de 200 anecdotes. J’ai beau les avoir entendues des dizaines de fois, je ne peux pas m’empêcher d’en rire encore.
Certaines situations relèvent de la science-fiction
J’aime transmettre mes savoirs, mais aussi accompagner mes élèves dans une étape importante de leur vie : l’obtention du permis de conduire. Certains maîtrisent déjà les bases de la conduite, tandis que d’autres partent de zéro.
Grâce à ces disparités, je ne suis jamais tombé dans la routine. C’est d’ailleurs ce qui rend ce métier passionnant, même si certaines situations relèvent de la science-fiction. Je me souviens d’une élève, qui m’avait demandé :
"Est-ce qu’on est obligés de choisir une place où il n’y a personne, pour se garer ?"
Sur le moment, je me suis simplement demandé si j’avais bien entendu. J’étais tellement étonné que je n’ai pas su quoi répondre. Mais très vite, je me suis mis à rire.
Rire avec ses élèves de leur propre bêtise
Heureusement, les élèves se moquent souvent de leur propre bêtise. C’est d’ailleurs ce qu’il s’est passé durant un cours de moto, que je n’oublierai jamais. Mon élève, confiant, avait enfilé sa tenue, ses gants et son casque. Il est monté sur la moto, a démarré le moteur et a appuyé sur l’accélérateur.
L’engin n’a pas bougé. Surpris, il m’a regardé et m’a demandé ce qu’il se passait.
J’ai pointé mon doigt vers le sol, pour lui montrer qu’il avait oublié d’enlever la béquille de la moto. Nous avons tellement rit que nous n’avons pas pu aller au bout du cours.
"Je n'ai pas vu la ville 'Aufeuagauche'"
Bien souvent, je dois aussi faire preuve de patience, car tous les élèves ne sont pas égaux face à l’apprentissage de la conduite. Si certains comprennent vite, d’autres ont besoin qu’on leur répète les mêmes choses plusieurs fois.
Un jour, j’ai demandé à une élève d’aller "à gauche au feu". Voyant que celle-ci ne mettait pas le clignotant, j’ai répété ma demande. L’élève regardait partout autour d’elle, l’air perdu. Finalement, elle a dépassé le feu, sans tourner à gauche. Quand je lui ai demandé pourquoi elle ne m’avait pas écouté, elle m’a simplement répondu :
"Je n’ai pas vu de panneau indiquant la ville 'Gauchaufeu'."
Durant un autre cours, une élève avec qui j’avais déjà fait une vingtaine d’heures de conduite, m’a quant à elle demandé :
"À chaque fois qu’il y a un feu rouge, il faut que je m’arrête ?"
Face à ce genre de situations, qui peuvent paraître désespérantes, je n’ai jamais perdu de vue mon objectif : aider mes élèves à obtenir le permis de conduire.
Une élève a lâché le volant et les pédales
Malgré ma bonne volonté, mes nerfs ont souvent été mis à rude épreuve. Tout moniteur d’auto-école qui se respecte a déjà fait face à un élève qui ne voit pas un "Stop" et qui le franchit, ou qui s’insère dans un rond-point alors qu’un poids lourd arrive à toute vitesse.
Après avoir sauté à pieds joints sur le frein, il faut gérer la réaction de l’élève. Certains d’entre eux font preuve de mauvaise foi et disent qu’ils avaient largement le temps de passer, tandis que d’autres font des crises de panique.
Je me souviens d’une élève qui avait pris un peu trop de vitesse et qui a perdu ses moyens. Tout à coup, elle a lâché le volant et les pédales. Dans ces moments-là, il faut faire preuve de sang-froid : un moniteur d’auto-école n’est jamais à l’abri d’une telle frayeur.
Ce livre, c'est une façon de rendre hommage à mes élèves
Si j’exerce ce métier depuis 23 ans, c’est parce que je n’ai jamais cessé de me remettre en question et d’adapter mes méthodes d’enseignement aux difficultés de chacun.
J’ai aussi fait preuve d’indulgence, car je sais bien que les situations rocambolesques auxquelles j’ai été confronté sont avant tout dues au stress. Les élèves doivent gérer les pédales et le volant tout en regardant autour d’eux et en écoutant le moniteur. Pour certains, c’est trop d’informations en même temps.
Aujourd’hui, il m’arrive de croiser d’anciens élèves, dont les anecdotes sont compilées dans "Les petites âneries du permis de conduire", au volant de leur voiture. Je les ai aidés à surmonter leurs difficultés et c’est une vraie fierté. Ce livre, c’est une façon de leur rendre hommage, avec humour et tendresse.
Propos recueillis par Anaïs Chabalier.